Back to top

Le mot de la présidente / L’orchestration d’une catastrophe : la mauvaise gestion de l’Université Laurentienne

Le mot de la présidente / L’orchestration d’une catastrophe : la mauvaise gestion de l’Université Laurentienne

President Brenda Austin Smith

par Brenda Austin-Smith

Lorsque l’administration de l’Université Laurentienne a demandé à se mettre à l’abri de ses créanciers en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC) en février 2021, une onde de choc s’est fait sentir à la grandeur du pays. C’était la première fois qu’une institution publique demandait le même type d’égard accordé aux entreprises privées à but lucratif comme Sears, Canwest Global Communications Corp., Le Château et Toys "R" Us.

La LACC étant une mesure législative fédérale hostile, l’administration de l’Université Laurentienne a pu contourner les obligations relevant des conventions collectives des professeurs et du personnel de soutien de l’université, leur refusant une pleine indemnité de départ, écartant les griefs en suspens, et éviscérant les droits et les avantages sociaux. Dans l’ensemble, 195 professeurs et membres du personnel de soutien ont perdu leur emploi, un tiers des programmes a été éliminé, et les plans d’éducation de centaines d’étudiants ont été chamboulés ou complètement anéantis.

Nous savons aujourd’hui que cette situation n’aurait jamais dû se produire. L’administration opaque et incompétente est à blâmer, elle qui a stratégiquement choisi cette façon de se sortir des problèmes financiers plutôt que de se conformer aux normes du secteur et aux processus relevant des conventions collectives. Nous le savons parce que Bonnie Lysyk, la vérificatrice générale de l’Ontario, a publié un rapport préliminaire en avril sur l’insolvabilité de l’Université Laurentienne. Sa lecture est révoltante. Le rapport est cinglant dans son accusation contre une administration extraordinairement incompétente qui a mené à la perte d’une institution publique, refusant de partager des informations avec l’Association des professeures et professeurs (APPUL) de l’université sur ce qui se passait réellement.

Bonnie Lysyk relève des « dépenses en immobilisations peu réfléchies », la mauvaise gestion des affaires financières et des activités de l’université, et la « faible surveillance » exercée par le Conseil des gouverneurs comme étant les causes premières de cet échec. Mais son rapport va plus loin et aborde les accusations portées contre nos collègues voulant que les salaires des professeurs soient à l’origine de la crise. Faux, précise Bonnie Lysyk, dont l’équipe a constaté que la rémunération des professeurs ne dépassait pas « de façon significative » celle d’universités comparables.

La vérité, selon le rapport, est que « les salaires et les frais élevés des cadres supérieurs ont eu une incidence négative sur la situation financière de la Laurentienne ». Le nombre de cadres supérieurs à l’université était relativement plus élevé que dans la plupart des universités de l’Ontario, certains candidats aux postes de direction ont été embauchés « sans justification consignée clairement », et « les salaires des cadres supérieurs excédaient les limites fixées par la loi ». Par conséquent, entre 2010 et 2020, les coûts rattachés à la haute direction ont grimpé de 75 %.

Malgré cette rémunération excessive, le rapport suggère que la direction de l’Université Laurentienne a failli à la tâche : elle a refusé de coopérer avec l’APPUL, refusé de partager des informations cruciales au sujet de la situation financière de l’établissement qui l’ont amené à déposer une demande d’insolvabilité en vertu de la LACC, et tardé à traiter des griefs du syndicat, « y compris ceux dans lesquels la discrimination et le harcèlement sont allégués ».

Les divers comités de gestion, dont le Comité de vérification, ne se sont pas non plus acquittés de leurs responsabilités de façon responsable et transparente. Cet échec a pris des proportions spectaculaires, un échec que le personnel, les étudiants et la communauté de Sudbury ont payé très cher.

Par-dessus tout, Bonnie Lysyk et son équipe confirment ce que bon nombre d’entre nous soupçonnaient, c’est-à-dire que la demande d’insolvabilité en vertu de la LACC n’était pas nécessaire. Il s’agissait plutôt d’une décision stratégique, laquelle a « permis à la Laurentienne de limiter la divulgation complète des renseignements financiers et opérationnels au public et aux autres intervenants ».

Qui a profité de ce désastre? Les avocats et les consultants, indique le rapport. L’institution à court d’argent a en quelque sorte remis 24 millions de dollars à des organismes extérieurs, y compris ceux qui avaient recommandé et guidé le processus d’insolvabilité lui-même, et ce, alors que la direction avait déjà fait main basse sur les fonds destinés aux prestations de santé des employés et aux projets de recherche.

Un rapport final plus détaillé sur cet échec retentissant suivra ultérieurement. Cependant, les informations que dévoile le rapport actuel sont plus que honteuses. Il faut espérer qu’un tribunal finira par examiner tous les détails de ce qui s’est passé à l’Université Laurentienne et qu’il tiendra les bonnes personnes responsables de ce gâchis.

Dans l’intervalle, le Conseil de l’ACPPU a de nouveau, en avril, adopté à l’unanimité une motion condamnant l’administration de l’Université Laurentienne et demandant le congédiement des cadres supérieurs. Il est difficile d’imaginer comment ces personnes, ayant si peu d’égard pour la transparence et la compétence, peuvent conserver leur poste. Et pourtant, ils sont là, indemnes, intouchables et sans aucun compte à rendre.

La justice appelle, au minimum, au congédiement de Robert Haché, de Marie-Josée Berger, de Claude Lecroix et de Serge Demers de l’Université Laurentienne, ainsi que de Ross Romano, le ministre de la Formation et des Collèges et Universités de l’Ontario. Joignez vous à moi pour exiger leur licenciement collectif.

En relation

/sites/default/files/styles/responsive_low_constrict/public/may-june-2022bulletin-graphic-864x386.png?itok=TEJELTlv
mai 2022

Bulletin de l'ACPPU — Mai-Juin 2022

Télécharger la version intégrale. Lire la suite
/sites/default/files/styles/responsive_low_constrict/public/may-june-bulletin-2022-dsc00104-risa.jpg?itok=8-qQvEKk
mai 2022

Entrevue / Risa Lieberwitz

Risa Lieberwitz est l'avocate générale de l’American Association of University Professors... Lire la suite
/sites/default/files/styles/responsive_low_constrict/public/may-june-2022bulletin-acadia-news.png?itok=jSyGJOXF