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Entretien / Lorna Wanosts’a7 Williams

Entretien / Lorna Wanosts’a7 Williams

[Indspire.ca]

Lorna Wanosts’a7 Williams (Ph. D.) est membre de la Première Nation Lil’wat de Mount Currie, en Colombie-Britannique. Elle a dirigé l’éla­boration d’un baccalauréat et d’une maîtrise en revitalisation des langues autochtones, ainsi que d’une maîtrise en counselling dans les communautés autochtones pour l’Université de Victoria, où elle est professeure émérite en éducation autochtone (programme d’études et enseignement). Elle a également conçu un cours obligatoire d’éducation autochtone pour tous les étudiants en enseignement de la Colombie-Britannique. Elle a reçu l’Ordre du Canada en décembre 2020. Elle animera une discussion lors d’un futur événement de l’ACPPU sur l’autochtonisation du milieu académique qui aura lieu le 15 octobre prochain.

Comment définissez-vous l’autochtonisation?

L’autochtonisation désigne l’intégration des points de vue et des façons d’être autochtones à notre pratique au sein des établissements et dans notre société. C’est aussi lorsque nous sommes libres d’être qui nous sommes et que le public et les établissements le comprennent et le reconnaissent.

Qu’est-ce qui contribue aux récents progrès en matière d’autochtonisation?

La visibilité croissante des peuples autochtones au pays y contribue. Une partie de la pratique coloniale consistait à rendre les peuples autochtones invisibles, non visibles dans la société, ou visibles uniquement d’une façon très particulière, habituellement de manière dégradante et déshumanisante. Mais les choses ont commencé à changer. De plus en plus de Canadiens s’informent sur les enjeux autochtones, et les plus jeunes sont beaucoup plus ouverts à cette éducation que les générations précédentes.

Que pensez-vous de la nomination de Mary Simon en tant que première gouverneure générale inuite du Canada?

Mary Simon a été nommée une fois auparavant et n’a pas été choisie. Le fait que sa candidature soit considérée de nouveau et acceptée et qu’elle accepte le rôle augmente la visibilité et accélère le changement dans la façon dont les peuples autochtones sont perçus.

Je crois que les Canadiens sont enfin prêts à entendre leur histoire sous un autre angle. L’identification de tombes anonymes, près des pensionnats indiens, a évidemment fait l’objet d’une couverture médiatique et est devenue un sujet de débat actif.

L’Organisation des Nations Unies a également accru la visibilité des peuples autochtones en déclarant 2019 l’Année des langues autochtones. Cette même année, la Loi sur les langues autochtones a enfin été adoptée au Canada. Plus récemment, un commissaire autochtone a été nommé.

Quel rôle voyez-vous pour les établissements d’enseignement post-secondaire dans la préservation des langues autochtones?

Les universités ont joué un rôle actif et fait une grande différence dans l’ensemble de mon travail de revitalisation des langues autochtones. En plus de leurs programmes réguliers, certaines universités ont offert des cours et des programmes aux personnes qui travaillent sur les langues autochtones dans les communautés afin d’apprendre ensemble, d’apprendre des façons de faire les choses, de protéger et de revitaliser les langues. Les cours axés sur les langues autochtones et la revitalisation des langues autochtones ont véritablement soutenu ces communautés.

Cependant, les langues autochtones n’ont pas encore leur place dans la structure de l’enseignement supérieur. Par exemple, l’étude des langues, même dans l’apprentissage d’une deuxième langue, se fonde souvent sur les langues européennes et euro-occidentales. La perspective et les langues autochtones n’ont pas leur place dans ces modèles. La revitalisation des langues n’a pas non plus sa place dans la structure actuelle. La situation doit changer.

L’autochtonisation du milieu académique peut-elle avoir un impact sur la revitalisation des langues autochtones?

Un impact a déjà commencé à se faire sentir, mais les défis à relever sont nombreux. Nous avons désespérément besoin d’enseignants en langues autochtones dans les communautés, les écoles autochtones et les écoles publiques. Mais il est très difficile pour les enseignants en langues autochtones d’obtenir une certification. Ils peuvent obtenir un diplôme, mais pas la certification professionnelle des provinces. J’ai mené un projet de recherche sur les enseignants en langues autochtones en Colombie-Britannique. C’était alors le besoin le plus pressant de la province, tant dans le système public que dans le système scolaire des bandes des Premières Nations.

Comment les établissements d’enseignement postsecondaire peuvent-ils devenir des espaces ouverts à l’apprentissage du savoir autochtone?

Les établissements d’enseignement postsecondaire doivent être en mesure de remettre en question leurs fondements, lesquels reposent tous sur une position philosophique très euro-occidentale sur ce qu’est le savoir et la façon dont nous l’acquérons, et d’y réfléchir activement. Ils doivent briser les obstacles qu’ils ont érigés autour du savoir et de la façon dont nous l’acquérons. À l’heure actuelle, toutes les autres formes de savoir sont tenues à l’écart. C’est une lourde tâche pour les établissements puisqu’ils de­­vront redéfinir leur identité, une identité qu’ils ont établie au fil des siècles.

Qu’est-ce qui vous donne de l’espoir?

J’entends et je vois des jeunes, des étudiants actifs dans les universités, qui demandent une meilleure compréhension du savoir autochtone. C’est ce qui me donne de l’espoir. Ce sont les jeunes qui apporteront des changements. Lorsque je visite des universités d’un bout à l’autre du pays, et dans de nombreuses autres régions du monde, les gens veulent en savoir davantage sur le savoir autochtone.

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