
Par Peter McInnis
Ces dernières années, de nombreux incidents ont été sources de divergences entre les enseignantes et enseignants, d’une part, et leur établissement de l’autre. Les enquêtes et rapports sur ces événements ont rappelé l’obligation positive de protéger la liberté académique et, de façon similaire, de promouvoir la gouvernance collégiale puisque les deux se renforcent l’un l’autre.
La gouvernance collégiale peut prendre plusieurs formes, y compris la participation à des organes décisionnels, à des comités mixtes chargés de gérer les conventions collectives, à des groupes de travail sur la santé et la sécurité au travail et à des consultations sur l’embauche ou la reconduction d’administratrices et d’administrateurs de haut niveau.
Bien qu’on ait tendance à penser que l’exclusion du personnel académique des activités d’embauche et de reconduction des administratrices et administrateurs de haut niveau est une pratique établie de longue date, la réalité est tout autre. Plusieurs associations de personnel académique ont une convention collective leur permettant de participer activement à la nomination et à l’évaluation des administratrices et des administrateurs académiques.
Certaines clauses assurant la participation à l’embauche et à la reconduction ont été négociées pour la première fois dans les années 1970, à une époque où l’inclusion démocratique bénéficiait d’un large soutien. Dans certains établissements, des efforts ont été déployés pour éliminer ce rôle collégial. L’avènement des cabinets de recrutement privés et des processus fermés de recherche de cadres a exacerbé la situation. Or, cela nuit aux relations collégiales positives en érodant la relation nécessaire entre le personnel académique et les cadres administratifs, et affaiblit la responsabilisation.
Des associations de personnel académique ont récemment obtenu, par voie de négociations, l’élargissement et la clarification de leur rôle dans la nomination initiale du personnel administratif de haut niveau, l’évaluation périodique de son rendement et sa reconduction ultérieure. Cette tendance devrait se poursuivre.
La plupart de nos établissements fonctionnent selon un modèle de gouvernance bicaméral qui devrait être fondé sur le maintien de liens efficaces entre les volets académique et administratif. L’exclusion du sénat des processus décisionnels du conseil d’administration reste un problème persistant étant donné l’importance des perspectives du personnel académique dans les délibérations académiques.
Les conseils d’administration ne doivent pas prendre de décisions sur des questions académiques ni imposer de mandat académique à leur établissement. Ils doivent également empêcher des intérêts extérieurs, qu’il s’agisse de gouvernements ou de donateurs privés, d’exercer une influence indue sur les activités académiques.
L’absence de consultation avec le personnel académique ou l’imposition de mesures pseudo-consultatives nuit à l’esprit et au fonctionnement de la gouvernance collégiale. Le personnel académique offre un point de vue inestimable sur toute une série de questions touchant l’éducation postsecondaire, ce qui rend contre-productifs les efforts visant à contourner le rôle du sénat.
Le renforcement des liens entre le personnel académique et administratif est une approche constructive d’organisation efficace qui encourage la transparence et favorise la détermination par voie démocratique des objectifs stratégiques organisationnels liés aux conditions du travail académique.
Les conventions collectives devraient appuyer le principe d’équité en emploi et un processus de renouvellement du personnel académique. Des questions allant de l’équité à la liberté académique, en passant par la santé et la sécurité, doivent également être prises en compte. Les conventions doivent donc être observées et appliquées de près, comme l’exige leur caractère juridiquement contraignant.
L’ACPPU a mis sur pied un Comité de la gouvernance, d’abord à titre d’initiative ad hoc, mais désormais normalisé en tant que sous-comité du Comité de direction. La participation au Comité de la gouvernance donne aux associations membres l’occasion d’analyser les pratiques de gouvernance collégiale adoptées à l’échelle nationale et de formuler des pratiques exemplaires pour développer cet élément important de l’environnement de travail professionnel.
La Collection sur la gouvernance de l’ACPPU est une ressource évolutive à l’intention des associations membres qui explique sommairement les principaux concepts de la gouvernance collégiale. Plus tard cette année, une collection élargie offrira aux associations membres un soutien supplémentaire pour défendre la gouvernance collégiale et établir les voies à suivre pour réaliser les réformes nécessaires.
La section d’introduction de la Collection résume le débat : « En tant que membre central de la communauté d’érudites et érudits, le personnel académique joue non seulement un rôle institutionnel clé par son travail académique immédiat — par exemple, par l’enseignement et la recherche — mais aussi un rôle collégial. Tout en faisant partie de la communauté d’érudites et d’érudits de son établissement, chaque membre du personnel académique en est l’employé ou employé. La tension inhérente à la double nature du rôle du personnel académique exige un environnement de travail (incluant des conditions d’emploi formelles) qui protège et favorise la dimension collégiale du rôle. »
La gouvernance collégiale offre donc une occasion constructive, que nous devons saisir, de participer à l’effort collectif de soutien à l’enseignement supérieur canadien.