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Le coin du directeur général / Liberté académique et sécurité nationale

Le coin du directeur général / Liberté académique et sécurité nationale

Par David Robinson

La liberté académique, comme toutes les libertés d’expression, est particulièrement vulnérable lorsque les craintes en matière de sécurité nationale sont grandes. Dans les années 1950 et 1960, des chasses aux sorcières anticommunistes ont visé plusieurs universitaires de renom.

La GRC a accusé le mathématicien Israel Halperin de l’Université Queen’s dans l’affaire Gouzenko en 1946. Malgré l’acquittement du mathématicien, certains membres du conseil d’administration de l’Université Queen’s ont exigé qu’il soit démis de ses fonctions. Le physicien mathématicien Leopold Infeld a démissionné de l’Université de Toronto en 1950 à la suite d’allégations sans fondement selon lesquelles il aurait transmis à l’Union soviétique des renseignements sur la bombe atomique.

Ce n’est pas une coïncidence si Halperin et Infeld étaient tous deux juifs. Les tropes antisémites de l’époque décrivaient les Juifs comme des agents étrangers de connivence avec Moscou. En 1940, le directeur de la faculté de droit de l’Université de Toronto, W.P.M. Kennedy, a exigé que Bora Laskin signe un serment de loyauté comme condition d’embauche, s’engageant à n’avoir aucune sympathie communiste ou subversive.

Lorsqu’il est devenu président de l’ACPPU en 1963, Laskin a négocié un accord avec le premier ministre Lester Pearson pour répondre aux préoccupations croissantes découlant des enquêtes de la GRC sur les universitaires, les étudiantes et les étudiants. L’accord Pearson-Laskin, comme il est désormais appelé, autorisait les agents de sécurité à pénétrer sur le campus seulement après en avoir informé l’administration et l’association des professeures et professeurs, et uniquement pour faire des contrôles de sécurité ou « lorsqu’il y [avait] nettement lieu de croire que des personnes se [livraient] peut-être à l’espionnage ou à des activités subversives ». L’accord a été réitéré dans plusieurs directives ministérielles, dont celle de 1997 sur les Enquêtes de sécurité dans les établissements d’enseignement postsecondaire.

Selon le principe de base de l’accord Pearson-Laskin, les agences de sécurité, compte tenu de l’importance de la liberté académique, ne doivent pas s’engager dans une surveillance générale des universités et des collèges. Seules les menaces définitives pour la sécurité nationale peuvent justifier des enquêtes.

Ces mêmes principes devraient s’appliquer alors que le gouvernement fédéral dévoile de nouvelles règles ciblant les risques perçus pour la sécurité nationale sur les campus. L’obligation de divulguer les risques dans les domaines de recherche sensibles, l’interdiction touchant les recherches menées en collaboration avec des établissements étrangers liés à des agences militaires ou de sécurité, et un projet de registre d’« influenceurs étrangers » ont tous été introduits au cours de la dernière année. Bien qu’elle ne soit pas explicitement mentionnée, la Chine est perçue comme une menace.

La recherche universitaire peut présenter des risques légitimes pour la sécurité nationale, mais nous devons, en tant que communauté, nous garder de tout excès. Nous devons veiller à ce que les universitaires ne soient pas ciblés en raison de leur origine ethnique et à ce que les règles ne soient pas si larges qu’elles restreignent la recherche et l’érudition légitimes. La loi sur l’influence étrangère ne doit pas non plus être utilisée à mauvais escient pour cibler les universitaires qui critiquent la politique militaire ou étrangère du Canada.

Conformément à l’accord Pearson-Laskin, le gouvernement, pour justifier toute restriction de la liberté académique, doit démontrer l’existence d’une menace définitive et l’absence d’autres mesures viables.

Nous ferions bien de tenir compte du célèbre avertissement de Benjamin Franklin : « Ceux qui renoncent à une liberté essentielle pour obtenir un peu de sécurité temporaire ne méritent ni liberté ni sécurité. »

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