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Coin des livres / Carbon Blues – Cars, catastrophes and the battle for the environment

Coin des livres / Carbon Blues – Cars, catastrophes and the battle for the environment

Mike Mason
McGill-Queen’s University Press, 2020; 328 pp;
ISBN: 978-0-2280-0150-8.

Par Robin Whitaker

Carbon Blues est un ouvrage ambitieux. Combinant une approche chronologique et thématique, l’auteur introduit brièvement son propos dans un chapitre sur la révolution industrielle propulsée par l’exploitation du charbon The Smog of Capitalism, se penche rapidement sur la course au pétrole dans The Scramble for Oil pour se tourner ensuite vers Carbon America où, sous sa lorgnette, très peu de politiciens canadiens font bonne figure. Il s’intéresse dans les chapitres suivants à la croissance automobile, au déni face aux changements climatiques (Exxon knew), aux catastrophes liées au climat, au mouvement environnemental, aux énergies renouvelables et à la remédiation. Dans le dernier chapitre, Reckoning: 2020-2050, il conclut en faisant notamment état de ses perspectives pour les années à venir. Une chronologie de la période 1947-2019 figure en annexe. Mike Mason promet au lecteur « un bref historique des changements climatiques, ainsi qu’un aperçu de leurs conséquences, de leurs négateurs, des solutions de remédiation et de ce que l’avenir nous réserve ». Or, Carbon Blues n’est pas tant un ouvrage historique au sens où l’entendent généralement les historiens qu’un catalogue de méfaits et d’horreurs tempérés par des moments de ressac.

Dans le chapitre nommé Motoring to Armageddon, par exemple, il décrit la prolifération des véhicules motorisés privés, la pollution liée à leur fabrication et à leur utilisation, et le scandale du dieselgate : l’emploi par des constructeurs d’automobiles allemands de « dispositifs de manipulation » dans le but de fausser les résultats des contrôles d’émissions polluantes de leurs véhicules. Cependant, l’auteur ne fournit pas d’analyse systématique des forces politiques et des décisions précises qui ont mené à la domination de l’automobile. De même, il se fait persuasif en signalant que l’application rigoureuse de règlements sur les émissions des véhicules automobiles a peu de poids comparativement au nombre considérable de véhicules sur la route tout en n’offrant aucune issue tangible pour se sortir de cette « spirale infernale » outre de vagues espoirs que les gens optent de plus en plus pour des véhicules électriques ou pour une vie sans voiture.

Cette approche est omniprésente dans Carbon Blues. Bien que l’auteur identifie certains vecteurs — les frères Koch, l’équipe d’opérations clandestines d’Exxon, des politiciens populistes et conservateurs, notamment, il ne donne pas moins l’impression que les choses se sont simplement produites. Pendant un certain temps, l’environnementalisme semblait gagner du terrain, les gens prenant conscience des effets du DDT, des coupes à blanc et de la pollution industrielle. « Puis, les choses ont changé. En 1981, il y a eu l’élection de Ronald Reagan aux États-Unis et celle de Margaret Thatcher en Grande-Bretagne... Au Canada, l’environnementalisme se heurtait à la manne que représentait l’exploitation des sables bitumineux et à des gouvernements fédéraux successifs, tant libéraux que conservateurs, qui se défilaient devant leurs responsabilités de protection de l’environnement ».

L’ouvrage ne présente pas d’études récentes; il repose plutôt sur un large éventail de sources secondaires, allant d’écrits journalistiques à des rapports techniques en passant par la théorie politique. L’auteur adopte un ton accessible, voire jovial, frôlant parfois le sarcasme. Ces caractéristiques devraient rendre l’ouvrage attrayant pour les étudiants et les lecteurs voulant se familiariser avec des événements et enjeux clés. Or, un nombre surprenant de fautes typographiques et d’inexactitudes ont échappé à la révision linguistique. Et même s’il souligne l’échec patent des médias de masse à établir les liens nécessaires entre les changements climatiques et d’autres enjeux, l'auteur traite la plupart des publications qu’il cite comme des sources également explicites d’information et d’analyse.

Mike Mason est nettement préoccupé par la situation actuelle et par celle vers laquelle nous nous acheminons et personne ne refermera ce livre sans avoir plus que jamais le sentiment que l’heure est grave et que la situation continuera de se détériorer si nous ne changeons pas de cap.

Enfin, le lecteur aurait probablement gagné à ce que l’ensemble des dévastations soit assujetti à un cadre d’analyse plus explicite. Carbon Blues fait ressortir l’importance des connaissances sur les causes et conséquences des changements climatiques et les mesures que nous devons prendre pour contenir la hausse de la température mondiale (dans la mesure où cela demeure possible). Au moins, il établit clairement ce que nous devons faire dans un sens purement mécanique : mettre fin à l’extraction et à la combustion du carbone. En 2020, le problème des changements climatiques est toutefois moins d’ordre technique que d’ordre politique; c’est un problème qui conjugue émotions et raison et qui nécessite de la détermination politique. Sur ce front, Carbon Blues soulève plus de questions qu’il ne fournit de réponses.

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Robin Whitaker est professeure agrégée au Département d’anthropologie de l’Université Memorial de Terre-Neuve et représentante ordinaire au Comité de direction de l’ACPPU.

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