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Entretien / Michael Lynk

Entretien / Michael Lynk

Michael Lynk
[Samantha Pope]

Michael Lynk est professeur agrégé à la Faculté de droit de l’Université Western où, depuis 1999, il donne des cours en droit du travail, constitutionnel et administratif, ainsi qu’en matière de droits de la personne et de personne vivant avec un handicap. Il a agi à titre d’arbitre en relations du travail pendant vingt ans et est vice-président et arbitre auprès de la Commission de règlement des griefs de l’Ontario depuis 2007.

Pourquoi vous consacrez-vous presque totalement depuis un an à votre rapport Academic Freedom and the Scope of Intramural Expression in Canadian Labour Law?

Ici au Canada, nous n’avons pas beaucoup de travaux savants sur le droit du travail et la place de la liberté académique dans cette sphère. Je me rappelle avoir lu il y a quelques années une affaire mettant en cause un professeur de physique à l’Université d’Ottawa; c’était une des premières affaires concernant la liberté académique dont je prenais connaissance. Je n’avais jamais été saisi d’une cause semblable ni dans mes fonctions d’avocat en droit du travail pour la partie syndicale ni dans celles d’arbitre en relations du travail. Je prenais alors conscience — ce fut une grande révélation pour moi, mais probablement pas pour les agents des griefs des associations de personnel académique — qu’au Canada, la liberté académique est étroitement liée au droit du travail.

Comment, à votre sens, la liberté académique telle que vous la concevez s’inscrit-elle dans un cadre de droit du travail au Canada?

Sous deux angles. Le premier a trait au fait que l’université est un milieu de travail hiérarchique où sont donnés des ordres ou des directives que nous, les travailleurs, suivons. Le deuxième, tout aussi important, est celui où nous devons tous étudier et approfondir la question et faire avancer le dossier. Nous avons des milieux de travail particuliers, où la liberté académique s’articule en quatre principaux droits : la liberté d’enseigner, la liberté d’effectuer des recherches et celle d’en publier les résultats et la liberté d’expression à l’intérieur et à l’extérieur de l’établissement. Les seules limites à ces droits sont la diffamation, le discours haineux, l’incitation à la violence, le harcèlement, la discrimination, le manquement à l’obligation de confidentialité, les atteintes à la vie privée et l’entrave aux droits d’expression d’autrui.

La manière dont la liberté académique est protégée dans les conventions collectives au Canada pose-t-elle un problème?

C’est simplement que nous ne faisons pas toujours le meilleur travail qu’il nous serait possible de faire quand nous négocions en arbitrage des définitions étendues, dynamiques et éloquentes à cet égard. Dans de nombreux pays, surtout en Europe et aux États-Unis, la liberté académique est la plupart du temps protégée au moyen d’une disposition constitutionnelle ou légale. Dans plusieurs pays, notamment au sein de l’Union européenne et en Afrique du Sud, la liberté académique est inscrite dans une constitution. La Constitution canadienne, cependant, en fait complètement abstraction, tout comme la législation. Les tribunaux canadiens sont donc très rarement saisis de causes impliquant la liberté académique, celle-ci étant quasi exclusivement protégée au Canada par la négociation et les conventions collectives.

Comment les associations de personnel académique peuvent-elles améliorer leur défense pour une définition robuste de la liberté académique?

Le fait que nous puissions négocier les libellés des clauses et ensuite les contester devant un arbitre procure un grand avantage par rapport à d’autres milieux qui doivent se défendre devant des tribunaux. Je peux citer en exemple quelques affaires ayant inspiré d’autres causes semblables au Canada où les arbitres ont soutenu une liberté académique robuste, mais où, par contre, leurs déclarations générales d’appui n’ont pas toujours trouvé écho chez d’autres arbitres canadiens. La liberté d’expression à l’intérieur de l’établissement est la liberté des universitaires de critiquer les pratiques ou politiques de leur établissement ou l’absence d’action sur le campus sans être frappés de censure institutionnelle. Ce droit est issu d’un éventail de lois et de politiques, y compris l’élaboration d’une définition de la liberté académique aux États-Unis promue par l’American Association of University Professors, et en particulier la recommandation de 1997 de l’UNESCO concernant la liberté académique et la condition du personnel enseignant de l’enseignement supérieur à laquelle l’ACPPU a largement contribué. Dans ma revue systématique des décisions arbitrales rendues au Canada relativement à la liberté académique et, surtout, au sujet de la liberté l’expression à l’intérieur de l’établissement, je n’ai jamais vu d’allusion à la déclaration de l’UNESCO, ce qui laisse supposer que les avocats représentant les associations de personnel académique ou bien ne connaissent pas cette déclaration, ou bien ne savent pas comment l’utiliser pour défendre efficacement ce genre de causes.

Les libellés des clauses des conventions collectives protégeant la liberté académique sont-ils en voie d’amélioration?

J’observe dans les négociations une amélioration et une analyse accrue des libellés concernant la liberté académique. Les associations de personnel académique tirent les enseignements de leurs erreurs et, au fil des rondes de négociations, améliorent et rehaussent le degré de protection que confèrent ces clauses.

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