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Le mot de la présidente / Définir les priorités de l’éducation postsecondaire

Le mot de la présidente / Définir les priorités de l’éducation postsecondaire

Par Brenda Austin-Smith

L’ACPPU est membre de l’Internationale de l’Éducation (IE), une fédération de plus de 400 syndicats représentant 32 millions d’enseignantes et d’enseignants et de membres du personnel de soutien éducatif dans 176 pays. Quelque 1 400 membres de l’Internationale de l’Éducation se sont rassemblés dans le cadre d’un congrès mondial, en juillet à Bangkok, afin de partager des histoires, de débattre des résolutions et d’échanger des stratégies pour combattre les menaces de toutes natures qui pèsent sur notre profession et sur les structures démocratiques qu’elle soutient.

Lors d’un caucus des affiliés de l’IE du secteur postsecondaire, nous avons entendu des récits inquiétants concernant des gouvernements autoritaires qui prennent pour cible les éducateurs et leurs établissements. L’ancien secrétaire général de l’IE, Fred van Leeuwen, a qualifié ces actes de tentatives visant à dégrader la réputation des universités en tant que référentiels de la connaissance humaine et de lieux de libre poursuite de l’apprentissage et de la recherche. On peut citer entre autres exemples le fait que le gouvernement italien cherche à interdire les livres scolaires qui lui accolent (à juste titre) l’étiquette d’extrême droite, l’intimidation et l’emprisonnement des universitaires en Turquie et la fermeture des départements et des facultés (telles les études de genre) considérés comme étant « sans pertinence économique », y compris au Royaume-Uni. Au Brésil, les femmes qui travaillent dans des disciplines perçues comme idéologiques — tels que les droits des peuples autochtones, le genre et l’équité raciale — sont particulièrement susceptibles d’être ciblées. Et les chercheurs brésiliens dans plusieurs domaines scientifiques sont également inquiets, comme le décrit le numéro d’avril 2019 du magazine Chemistry World.

Entre-temps, les attaques structurelles contre l’éducation postsecondaire se poursuivent à l’échelle mondiale, sous la forme de coupes dans le financement de base (l’Université de l’Alaska vient immédiatement à l’esprit) et d’embauches de professeurs à temps partiel plutôt qu’à temps plein. Selon les informations transmises par des collègues de l’IE aux délégués du congrès, pas moins de 60 % des enseignants au niveau postsecondaire en Australie travaillent à temps partiel, tandis que 79 % des enseignants dans les universités publiques colombiennes (dans les universités privées, 90 %) sont liés par des contrats à temps partiel et, d’après l’American Association of University Professors, près de 75 % des membres du corps professoral des universités et collèges américains occupent des emplois précaires. Ici au pays, il est difficile de trouver des chiffres fiables sur les travailleurs précaires parce que Statistique Canada ne recueille pas encore ce type d’information, bien que l’ACPPU continue de faire pression pour obtenir de telles données. Ce qui est clair toutefois, c’est que le recours aux contractuels contribue à la détérioration des droits associés à la liberté académique des personnes qui travaillent dans ces conditions. Leurs expériences sont racontées dans le rapport de 2018 de l’ACPPU, De l’ombre à la lumière, le premier sondage national mené auprès des professionnels précaires du secteur canadien de l’éducation postsecondaire.

Le congrès de l’IE a néanmoins été marqué par de nombreux moments positifs. Nous avons entendu des histoires de réussite de la part de syndicats qui, grâce à des campagnes de presse, à des contestations judiciaires et à des allégeances formées avec des étudiants, des parents et des communautés, sont parvenus à lutter contre la privatisation et la chasse aux profits, contre la révocation de nos compétences professionnelles d’éducateurs et contre la censure et l’intimidation des gouvernements. Nous avons également partagé un récent exemple canadien de succès de mobilisation : en 2017, plus de 12 000 adhérents au SEFPO membres du personnel scolaire des collèges ont tenu une grève de cinq semaines pour obtenir le droit à la liberté académique ainsi qu’une rémunération et des contrats équitables. Par ailleurs, les représentants de l’ACPPU et leurs collègues du Zimbabwe et du Ghana ont déposé une résolution visant à surveiller et à signaler les atteintes à la liberté académique, que les délégués, dans un extraordinaire geste de solidarité internationale, ont adoptée par une écrasante majorité.

Dans une émouvante allocution prononcée devant l’assemblée du congrès, le nouveau secrétaire général de l’Internationale de l’Éducation, David Edwards, a dénoncé le surplus « de découragement et d’irrévérence » qui se manifeste à l’échelle mondiale et a appelé les délégués à « mettre l’équité et la décence au rang des priorités universelles ». Aussi troublant que ce soit d’apprendre de collègues qu’ils ont été menacés, emprisonnés et réduits au silence par des gouvernements autoritaires pour le seul fait d’être éducateurs, nous devons réfléchir sérieusement en cette saison électorale à la façon dont sont traités les universitaires qui travaillent au Canada et aussi à la mesure dans laquelle notre propre système d’éducation postsecondaire est équitable et accessible. La garantie de conditions de travail justes et décentes pour tous part d’ici et maintenant.

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