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Les menaces contemporaines

Travail académique précaire

Au cours des dernières décennies, les universités et collèges ont de plus en plus employé du personnel académique à temps partiel ou dont le contrat est à durée déterminée. On estime qu'entre un tiers et la moitié du personnel académique au Canada est actuellement en situation de travail contractuel précaire et de courte durée.

Cette évolution du statut de l'emploi a des répercussions importantes sur la liberté académique. Le système de titularisation a toujours servi de moyen procédural de protection de la liberté académique. Après une période probatoire longue et rigoureuse, la titularisation fait en sorte qu'on puisse uniquement licencier le personnel académique pour un motif valable, tel qu'une nécessité financière véritable ou une faute grave. La titularisation vise à protéger la liberté académique en garantissant que les membres du personnel académique ne perdent pas leur poste en raison de leur discours, publications ou résultats de recherche, même si leur travail risque d'offenser des intérêts puissants, y compris des intérêts commerciaux ou gouvernementaux.

Aujourd'hui, plus les universités et collèges font appel à des enseignantes et à des enseignants non titularisés, et moins ils comptent de personnel académique bénéficiant de la protection procédurale offerte par la titularisation. Les établissements n'ont même plus à licencier les membres de leur personnel académique contractuel qui traitent de sujets controversés pouvant nuire à des intérêts puissants. Ils peuvent tout simplement décider de ne pas renouveler leur contrat. Afin qu'il puisse exercer pleinement sa liberté académique sans crainte de représailles, le personnel académique contractuel doit bénéficier de protections procédurales et de clauses de sécurité d'emploi plus rigoureuses.

Pressions des donateurs et des entités commerciales

Les pressions exercées par les donateurs et les exigences et incitatifs liés à la commercialisation de la recherche peuvent mettre la liberté académique en péril. Si la plupart des projets financés par des donateurs font l'objet d'un traitement approprié, l'influence exercée par certains donateurs dans le processus de nomination, la conception de programmes, et le contenu et le calendrier de publications traitant de recherches commanditées a soulevé des controverses.

Les préoccupations relatives à l'influence des donateurs sur la recherche académique ont incité l'ACPPU à analyser, en 2013, 12 ententes auxquelles étaient parties des universités, des donateurs, des entreprises et des gouvernements. L'enquête de l'ACPPU a révélé que sept des contrats ne prévoyaient « aucune protection spécifique de la liberté académique », tandis que d'autres ne donnaient pas aux chercheurs académiques le droit de publier de travaux issus des projets au-delà du délai normal de 60 jours prévu pour les demandes de brevets de société.

Ingérence politique

Partout en Amérique du Nord, certains gouvernements et membres de la classe politique s'ingèrent dans le fonctionnement des universités et des collèges en promulguant des lois qui imposent l'enseignement de contenus spécifiques dans les salles de classe, en interdisent d'autres comme les contenus traitant d'équité, de diversité et d'inclusion, et affaiblissent ou éliminent les régimes de titularisation.

L'exercice de la liberté académique exige que les établissements soient libres de pressions extérieures et d'ingérence politique. Les universités et les collèges ont la responsabilité de résister à cette influence extérieure, y compris à toute tentative des gouvernements, de la classe politique, des donateurs ou des groupes de pression de s'en prendre au personnel académique pour avoir exercé ses droits à la liberté académique.

Pour en savoir plus :

  • American Association of University Professors. Preliminary Report of the Special Committee on Academic Freedom and Florida, 24 mai 2023.
  • Jamie Brownlee. « Contract Faculty in Canada: using access to information requests to uncover hidden academics in Canadian universities », Higher Education, vol. 70, no 5 (novembre 2015), p. 787-805.
  • Matthew W. Finkin. The Case for Tenure, Ithaca et Londres, Cornell University Press, 1996.
  • Karen Foster et Louise Birdsell Bauer. De l’ombre à la lumière : les expériences du personnel académique contractuel, Ottawa, Association canadienne des professeures et professeurs d'université, septembre 2018.
  • James L. Turk (éd.) Universities at Risk: How Politics, Special Interests and Corporatization Threaten Academic Integrity, Toronto, Lorimer, 2008.
  • Ellen Schrecker. The Lost Soul of Higher Education: Corporatization, the Assault on Academic Freedom, and the End of the American University, New York et Londres, New Press, 2010.