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Entretien / Grahame McCulloch

Entretien / Grahame McCulloch

Grahame McCulloch, jusqu’à tout récemment secrétaire général du National Tertiary Education Union (NTEU) d’Australie, s’est adressé aux délégués à la 85e assemblée du Conseil de l’ACPPU en novembre. Il a parlé des nombreux enjeux communs aux deux organisations et pays, ainsi que des forces et des connaissances que nous gagnons à partager mutuellement.

Présenté par le directeur général de l’ACPPU comme un « grand ami et mentor », M. McCulloch a fait état d’une longue liste de caractéristiques communes aux deux pays — territoires continentaux largement urbanisés, hauts taux d’immigration et masse terrestre à densité de population assez faible selon les critères économiques — tout en soulignant l’uni-cité de l’ACPPU.

« L’ACPPU est sans doute le meilleur et plus solide syndicat de personnel académique indépendant au monde, a-t-il dit. Vous conjuguez politiques industrielles et droits professionnels comme nulle autre organisation et il y a là de quoi être fiers. »

Soulignant une communauté d’intérêts sous forme d’« un profond engagement envers l’internationalisme, une vision d’ensemble des droits de la personne et du personnel académique et un souci constant d’établir des relations et de collaborer avec nos collègues à l’échelle internationale », M. McCulloch n’en perçoit pas moins certains écarts entre nos philosophies émanant inévitablement de l’immense distance physique qui sépare les deux pays. On dénote chez les Australiens une indignation croissante face aux anciens liens coloniaux et aux nouvelles ficelles tendues entre les États-Unis et certains pays du Commonwealth, dont le Groupe des cinq, l’alliance des services du renseignement de l’Australie, du Canada, de la Nouvelle-Zélande, du Royaume-Uni et des États-Unis.

« Pour de nombreux Australiens, soutient-il, cette alliance est un affront à notre indépendance émergente. Elle bouscule nos priorités économiques et sociales et n’a pratiquement aucune pertinence en regard de la place que nous occupons en Asie, surtout de notre proxi­mité géographique et de nos relations économiques de plus en plus intégrées avec la Chine. »

Ces facteurs économiques sont en partie à l’origine des changements survenus dans le système d’éducation tertiaire en Australie et que connaissent également les universités et les associations de personnel académique canadiennes.

Le secteur académique australien accueille l’effectif d’étudiants internationaux le plus nombreux au monde toutes proportions gardées — 450 000 dans les universités et 150 000 dans les collèges. Or, ces étudiants, ainsi que les étudiants australiens, paient maintenant les droits de scolarité reconnus comme les plus élevés au monde, soit, respectivement, un minimum de 90 000 $ et de 30 000 $ par année.

Sur ce plan, nos deux pays divergent : en Australie, les droits de scolarité sont assortis de prêts consentis par le gouvernement remboursables en fonction des revenus dès la fin des études, à partir d’un seuil de revenus fixé à 50 000 $ par année.

« Ces facteurs ont créé une dynamique différente dans la structure de gestion de nos universités et leurs orientations, ajoute M. McCulloch. Ils favorisent l’implantation et la consolidation d’une forte culture managériale. Nos hauts dirigeants, qui étaient antérieurement des universitaires dotés de responsabilités administratives, sont de plus en plus des gestionnaires dont la principale tâche est de veiller à la réalisation du plan stratégique de l’administration centrale ou du plan stratégique de ce que l’administration centrale considère comme l’établissement : une entreprise multinationale. »

Les membres du personnel académique australiens ont trouvé une manière de bénéficier de la force du nombre différente de celle de leurs homologues canadiens. En l’absence de formule Rand, ils s’assurent l’adhésion des individus qui en manifestent volontairement l’intention.

« Nous abordons la négociation d’une façon qui s’écarte des normes tant internationales qu’australiennes, précise M. McCulloch. Nous avons un processus normalisé pour l’ensemble de nos secteurs. Le syndicat national, par la voie d’un processus démocratique, détermine pour chaque ronde de négociation des revendications obligatoires que toutes les sections locales doivent formuler et auxquelles s’ajoutent les revendications locales. Nous fixons un seuil de règlement en deçà duquel aucune section locale n’est autorisée à conclure un accord. Ces mesures peuvent paraître quelque peu stalinistes, mais elles ne le sont pas. C’est un processus avalisé par la grande majorité de nos membres. »

Et ça fonctionne. « Personne ne contestera le fait que nous sommes le syndicat qui connaît le plus de succès dans ses négociations collectives en Australie, signale M. McCulloch. Toutes les universités sans exception sont intégrées dans nos différentes conventions collectives. Nous représentons 3 % de la main-d’œuvre du pays, mais 10 % des conventions collectives dans l’ensemble de l’économie. »

Enfin, il est fier de ce qu’il appelle « la plus grande réalisation » du NTEU « l’exigence, relativement rare à l’échelle mondiale, d’intégrer dans chacune de nos conventions collectives une cible pour l’emploi des Autochtones qui a force de loi et dont l’application peut au besoin être imposée par voie d’arbitrage. Nous avons pratiquement doublé le nombre de membres du personnel académique autochtones en Australie ces dix dernières années. »

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