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Le mot du président / Égalité à géométrie variable

Le mot du président / Égalité à géométrie variable

Par James Compton

Tous les dirigeants canadiens les mieux nantis sont égaux, mais certains le sont plus que d’autres. Eh oui, même eux. À l’aube de la nouvelle année, le Centre canadien de politiques alternatives (CCPA) publiait un rapport exhaustif sur l’écart grandissant entre la rémunération des présidents-directeurs généraux les mieux payés et celle des travailleurs moyens au Canada. L’auteur déclarait alors : « Il y a 30 ans, ils “vivotaient” avec 40 fois le salaire d’un travailleur moyen; le ratio est maintenant de 193. » Un chiffre ahurissant, certes, mais il y a plus.

À la toute fin d’un article publié à ce sujet sur CBC.ca, on apprenait, « en passant », que seulement deux femmes figurent dans le palmarès du CCPA des 100 PDG les plus riches au Canada. Comme quoi les plus chanceux d’entre nous n’échappent pas aux divisions tenaces entre les sexes.

Le gouvernement libéral au pouvoir s’est positionné comme le champion de l’égalité et de l’équité, et il est vrai que le Cabinet pa­ritaire nommé par le premier ministre a semblé de bon augure. Quelles mesures ce gouvernement pourrait-il prendre pour remédier aux problèmes d’équité dans le secteur de l’éducation postsecondaire?

En octobre, la ministre des Sciences Kirsty Duncan a annoncé l’instauration de règles pour encadrer le concours pour l’attribution de 11 nouvelles CERC. Les universités par-ticipantes sont désormais tenues d’inclure un plan d’équité et de diversité détaillé dans leur demande. Les pratiques en matière d’équité ne doivent pas viser uniquement la sélection des titulaires de chaire, mais aussi le recrutement de femmes et de membres d’autres groupes revendiquant l’équité qui sont sous-représentés pour composer les équipes de recherche associées aux chaires. Ces règles sont bienvenues, mais ne dissipent pas toutes les préoccupations.

Le gouvernement libéral suit les traces de son prédécesseur conservateur en liant l’attribution de ces mégasubventions à l’obligation de mener des travaux dans des domaines qu’il juge prioritaires, comme l’innovation dans le secteur des affaires. Lui non plus n’entend pas laisser à la communauté scientifique le libre choix de ses sujets d’étude, validé par un processus d’évaluation par les pairs collégial et plus transparent. En outre, du fait de l’énormité du montant des subventions, un nombre restreint de chercheurs en bénéficieront, mettant sur la touche les plus jeunes savants qui devront ramer pour financer leurs projets de recherche

Par ailleurs, une augmentation des transferts fédéraux au secteur de l’éducation postsecondaire contribuerait assurément à redresser la barre dans d’autres domaines. Des décennies de compressions dans les subventions de fonctionnement ont eu des effets désastreux, tels des frais de scola­rité à la hausse, des classes plus nombreuses et plus d’emplois contractuels précaires pour le personnel académique. À l’heure actuelle, les paiements de transfert à l’appui de l’éducation postsecondaire sont inférieurs de 400 millions de dollars à ceux de 1992-1993, après correction pour l’inflation et la croissance démographique.

Rendons à César ce qui appartient à César. Le gouvernement a, dans son premier budget, injecté 76 millions de dollars dans les conseils subventionnaires du Canada, mettant ainsi fin à des années de disette. Cependant, compte tenu de l’inflation, il lui faudrait doubler ce montant chacune des trois prochaines années pour rétablir le financement de ces organismes à leur niveau de 2007.

Dans son rapport, la Commission de vérité et réconciliation a mis en lumière les préjudices causés dans le passé aux peuples autochtones au Canada et exposé le rôle important que la politique en matière d’éducation peut jouer dans le processus de réconciliation.

Pour commencer, il serait bon de revitaliser le Programme d’aide aux étudiants de niveau postsecondaire (PAENP). Depuis 1977, le PAENP verse aux communautés autochtones et inuites des subventions couvrant les coûts d’études universitaires ou collégiales. Cependant, aucun argent frais n’y a été investi depuis des années, contrairement à la demande et aux coûts qui ne cessent de croître. Il en ressort que le nombre d’étudiants autochtones financés par le programme depuis 1997 a diminué de près de 19 %.

Le gouvernement Trudeau a déclaré à plusieurs reprises vouloir renouveler la relation entre le gouvernement fédéral et les Premières Nations du Canada. Il ferait un pas important dans cette direction s’il reconnaissait que l’éducation est un droit issu des traités et s’il accordait un soutien financier suffisant au PAENP. Investir dans l’éducation serait non seulement profitable aux collectivités autochtones, mais aussi bénéfique pour la pérennité de l’économie canadienne.

Il est clair que le gouvernement a marqué un grand coup en rétablissant l’enquête et le Système d’information sur le personnel d’enseignement dans les universités et les collèges (SPEUC). La nouvelle enquête se démarquera de la précédente en incluant des données sur le nombre de contractuels académiques au pays. Avec le rétablissement du SPEUC, les décideurs politiques, les établissements et les associations académiques pourront plus facilement identifier les tendances et les défis en matière d’emploi, et cela renforcera l’équité dans la profession.


Les progrès sont indéniables. Mais le gouvernement fédéral a l’occasion de faire preuve de leadership en réinvestissant dans la recherche et dans l’éducation postsecondaire afin d’assurer un meilleur accès à l’éducation, une égalité des chances plus universelle et un traitement équitable des étudiants et du personnel des universités canadiennes.

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