
Par David Robinson
Le terme « sans précédent » a été souvent utilisé ces dernières semaines pour décrire les événements survenus au sud de la frontière. Il s’agit là d’un euphémisme, de toute évidence.
À travers un flot incessant de décrets exécutifs, l’administration Trump/Musk aux États-Unis a lancé, mis en pause puis relancé une guerre commerciale mutuellement destructrice contre le Canada et le Mexique. Elle a bouleversé des alliances géopolitiques établies de longue date. Et elle s’attaque ouvertement à l’indépendance et à l’intégrité de la communauté scientifique et de l’enseignement supérieur.
Pour les Canadiennes et les Canadiens, le message est on ne peut plus clair : sous leur présidence actuelle, les États-Unis ne sont plus un partenaire économique, diplomatique ou scientifique fiable. C’est pourquoi, après les élections du 28 avril, le prochain gouvernement fédéral devra agir sur tous ces fronts si nous voulons construire un Canada plus résilient.
Il nous faudra pour cela, entre autres, adopter une nouvelle approche dans la manière dont nous finançons et soutenons l’enseignement postsecondaire et la recherche. Aux prises avec des années d’insuffisance du financement de base et une baisse des inscriptions d'étudiantes et étudiants étrangers, bon nombre de nos universités et collèges dans tout le pays sont en difficulté. Des dizaines d’établissements ont été touchés par des suspensions d’inscriptions, des coupes dans les programmes et des licenciements. Cette situation affaiblit notre capacité pédagogique et scientifique à un moment où nous ne pouvons pas nous le permettre.
Pour trouver une solution à la crise financière, il faut que les gouvernements fédéral et provinciaux agissent. L’heure n’est pas aux querelles de compétences pour savoir qui est responsable du gâchis qui en résulte. Ce qu’il faut, c’est du leadership. Le prochain gouvernement fédéral devrait immédiatement s’engager avec les provinces à négocier des accords de financement multilatéraux, comme cela a été fait pour les soins de santé et les services de garde d’enfants, afin de renforcer nos universités et nos collèges.
En parallèle, le gouvernement nouvellement élu devrait investir dans une politique de recherche et de science de conception canadienne pour contrer les actions anti-science et anti-éducation de l’administration Trump. On a beaucoup écrit sur ce qui ressemble de plus en plus à une menace existentielle pour l’enseignement supérieur et la recherche au sud de la frontière. Mais les actions de Trump ne se limitent pas aux États-Unis.
En mars, j’ai été contacté par des chercheuses et chercheurs canadiens dont les projets sont financés en totalité ou en partie par des agences fédérales américaines. Elles et ils avaient reçu un long questionnaire pour confirmer que leurs travaux ne comportaient pas de composante « climat » ou « justice environnementale », de composante « idéologie du genre » ou d’éléments relatifs à la diversité, à l’équité et à l’inclusion. En d’autres termes, peu importe que vos recherches soient scientifiquement importantes. Si elles ne sont pas conformes à l’idéologie politique partisane de Trump, elles ne seront pas financées.
La présidence Trump fait peser de nombreuses menaces dangereuses, tant au niveau national qu’international. Mais elle offre également au Canada de nouvelles possibilités de jouer un rôle de premier plan. Se protéger de la présidence Trump ne signifie pas seulement lutter contre les effets des droits de douane et jouer un rôle plus important sur la scène internationale.
Nous devons également veiller à ce que le Canada soit mieux placé pour combler le vide laissé par l’abdication des États-Unis dans leur rôle de leader scientifique mondial. Pour ce faire, nous avons besoin de toute urgence d’une nouvelle donne pour l’enseignement postsecondaire et la recherche.